Des émissions radioactives d’iridium 192 dans un gammagraphe ont provoqué la mise en place d’un périmètre de sécurité de 200m et l’évacuation des riverains
1) Les articles parus les 11 et 12 avril 2024 dans les DNA…
… et l’info sur BFM-Alsace :
a) le 11.04.2024 :
b) le 12.04.2024 :
2) C’est quoi l’iridium 192 ? L’IRSN nous explique :
3) La préfecture du Haut-Rhin se veut rassurante :
Voici son communiqué (source : https://www.haut-rhin.gouv.fr/Actualites/Espace-presse/Communiques-de-presse-2024/Fin-des-operations-liees-aux-emissions-radiologiques-dans-une-entreprise-a-Colmar )
Fin des opérations liées aux émissions radiologiques dans une entreprise à Colmar
Mis à jour le 12/04/2024
Depuis mercredi 10 avril vers 19h00, les services de sécurité et de secours du Haut-Rhin sont mobilisés Rue Branly à Colmar pour ramener la source d’un grammagraphe dans son boîtier de protection et faire revenir ainsi le seuil de radioactivité à des normes conformes.
D’importants moyens humains et matériels, notamment un robot spécialisé de la sécurité civile et des tapis de plomb ont été nécessaires pour mener à bien les opérations engagées.
Les relevés de radioactivité sur l’ensemble de la zone concernée sont conformes aux seuils publics et tout risque de radiation est écarté.
Le périmètre de sécurité mis en place a été levé.
Les habitants résidents de la zone sont désormais autorisés à regagner leur domicile.
Le préfet du Haut-Rhin remercie le service d’incendie et de secours du Haut-Rhin, le service de déminage de la sécurité civile, la police nationale et l’ensemble des partenaires mobilisés dans la prise en charge de cet incident.
Bien sûr, tous ceux qui ont connu le sort du nuage de Tchernobyl, piégé en 1986 à la frontière franco-allemande grâce à un anticyclone complice du Professeur Pellerin, sont en droit de douter un tant soit peu de l’innocuité retrouvée.
Donc, ce vendredi matin 12 avril,
nous sommes allés consulter le site de l’Autorité de Sûreté Nucléaire dont l’une des missions est justement d’informer la population.
4) Et là… STUPÉFACTION :
RIEN !
Absolument RIEN sur le site de l’ASN !
STOP FESSENHEIM a donc écrit à l’ASN-Strasbourg
Notre mail du 12 avril 2024 à 12:28 à la Cheffe de Division de l’ASN :
Bonjour Madame Perier, J’ai été interpellé par un habitant de Colmar au sujet de la fuite d’iridium. Aussi ai-je souhaité recueillir l’information mise à disposition du public par l’ASN et… je n’ai rien trouvé sur le site, ce qui me laisse stupéfait. Bien sûr, j’ai retransmis la fiche de l’IRSN (organisme encore distinct, on s’en réjouit), ainsi que le communiqué de la préfecture. Que pouvons-nous répondre au public ? Une information complète et transparente est indispensable. Je publierai volontiers votre réponse sur le site de Stop Fessenheim https://stop- fessenheim.org . D’avance merci ! Bien cordialement, André Hatz – Président de Stop Fessenheim
Suite à notre interpellation, l’ASN a publié un communiqué.
Nous tenons sincèrement à remercier Madame Perier, Cheffe de la Division ASN Strasbourg, pour la suite rapide qu’elle a obtenue des services centraux de l’ASN.
Voici sa réponse (le 12 avril à 17:09) :
Re : iridium Colmar
Bonjour M. Hatz, Vous trouverez la note d’information de l’ASN relative à cet incident au lien suivant : https://www.asn.fr/l-asn-informe/actualites/blocage-de-source-radioactive-au-cours-d-un-chantier-de-gammagraphie-colmar-68 . Cordialement, Camille Perier
Et voici le communiqué de l’ASN
- Actualités
- Blocage de source radioactive au cours …
Blocage de source radioactive au cours d’un chantier de gammagraphie (Colmar – Haut-Rhin)
Publié le 12.04.2024 à 16h04
NOTE D’INFORMATION
Le 10 avril 2024 à 18h30, l’Autorité de sûreté nucléaire a été informée par la société APAVE d’un blocage de source radioactive survenu lors de la réalisation par Apave NDT de contrôles radiographiques sur le site de la société ADF à Colmar (Haut-Rhin).
L‘Apave réalise des contrôles radiographiques pour l’industrie sur chantier ou dans ses locaux. Elle bénéficie d’une autorisation de l’ASN lui permettant notamment de détenir et d’utiliser des appareils mobiles de gammagraphie (aussi appelés gammagraphes) de modèle GAM 80, lequel contient une source radioactive scellée d’iridium-192 de forte activité. Ces contrôles sont notamment destinés à vérifier la qualité des soudures lors de chantier métallurgiques ; ils permettent de visualiser l’état interne de la pièce métallique (et ses éventuels défauts), comme pour une radiographie médicale, mais à l’aide de rayonnements beaucoup plus puissants.
Lors d’une prestation de radiographie industrielle réalisée le 10 avril 2024 en fin de journée sur le site de la société ADF à Colmar, les opérateurs de la société Apave n’ont pas été en mesure de ramener la source d’iridium-192 en position de sécurité dans le projecteur. Restée ainsi en dehors du projecteur, cette source génère un flux important de rayonnements ionisants vers l’extérieur ; en revanche, il n’y pas de risque de contamination ni de dispersion de la radioactivité.
L’entreprise de contrôles radiographiques a pris des dispositions immédiates après la découverte de l’incident et a arrêté ses contrôles. La préfecture a activé un centre opérationnel départemental, en lien avec l’équipe d’astreinte de l’ASN, afin de coordonner l’action des services mobilisés (pompiers, forces de l’ordre). Compte tenu de la présence de rayonnement à l’extérieur du site, un périmètre de sécurité de 130 m a été mis en place. Le site de la société ADF ainsi que des entreprises et habitations voisines ont été évacués.
Dans un premier temps, une intervention de Cegelec Actemium (fournisseur du gammagraphe) et des pompiers a permis de mettre en place des protections pour réduire le flux de rayonnement ionisant et permettre ainsi de lever le périmètre de sécurité. Dans un second temps, Apave et Cegelec Actemium seront mobilisés pour analyser la situation et élaborer un scénario d’intervention pour remettre en sécurité la source radioactive. Ce scénario d’intervention sera soumis à l’approbation de l’ASN avant sa mise en œuvre.
L’ASN s’est rendue sur place le 11 avril 2024, afin d’apporter son concours aux pouvoirs publics dans la gestion de l’événement d’une part, et d’inspecter les conditions de réalisation du chantier mis en œuvre par la société Apave d’autre part.
Date de la dernière mise à jour : 12/04/2024
Commentaire de Stop Fessenheim
Avec ces informations de l’ASN les choses paraissent un peu plus claires : pas de risque de contamination ou de dispersion de la radioactivité (selon l’ASN), mais génération d’ un flux important de rayonnements ionisants vers l’extérieur… et à l’instant où nous écrivons, la source radioactive n’a pas encore été remise en position !
5) La CRIIRAD répond à notre demande :
Afin de se faire une opinion plus juste, Stop Fessenheim a aussi recueilli l’avis de la CRIIRAD. Bruno Chareyron, Conseiller Scientifique de la CRIIRAD nous a aimablement donné son point de vue :
» Dans cette affaire d iridium, il me semble qu’il y a eu un mauvais usage du mot « fuite ». Le fait que la source d’iridium 192 reste coincée en dehors de son coffret blindé n’entraine pas nécessairement une fuite de la matière iridium. En revanche les puissants rayonnements gamma qu’émet cette source peuvent induire un débit de dose important même à plusieurs dizaines de mètres voire au-delà. Pour empêcher cela il faut la recouvrir de matériaux qui « absorbent » les rayonnements en attendant de trouver le moyen de la remettre dans un coffret blindé.”
Et il nous écrit aussi qu’il serait intéressant que l’ASN communique “ la cartographie des débits de dose autour de la source et en particulier dans le domaine public.” et “si la source a été depuis remise en sécurité ?”
Nous avons donc suivi son conseil et adressé cette demande le 19 avril à l’ASN Strasbourg.
Nota : à titre documentaire, la CRIIRAD nous indique aussi que dans le passé il y avait eu un grave accident de contamination à Feurs, lors d’une tentative de débloquer une source de gammagraphie au cobalt 60, voir pages 16 à 18 de https://www.criirad.org/wp-content/uploads/2023/03/Dossier-IRSN-Extrait-Trait-d-Union-89-fevrier-2021.pdf
Stop Fessenheim tient à remercier ici Bruno Chareyron pour tous ces éclaircissements.
6) 22 avril 2024 : La source radioactive est encore sur place, sous les protections biologiques.
L’ASN précise la situation, mais ne dispose pas de la cartographie des relevés radiologiques opérés par le SDIS-68.
Stop Fessenheim sollicite la Préfecture !
L’ASN s’est montrée à nouveau très réactive et a répondu lundi 22 avril à notre dernier mail (de vendredi 19 avril). À la suite des informations qu’elle nous a apportées, nous venons d’écrire (ce lundi 22 avril) à Monsieur le Préfet du Haut-Rhin :
Monsieur le Préfet,
Je me réfère à votre communiqué du 12.04.2024 intitulé “Fin des opérations liées aux émissions radiologiques dans une entreprise à Colmar“ ainsi qu’à différents échanges épistolaires entre l’Autorité de Sûreté Nucléaire (Strasbourg), également la CRIIRAD, et notre association.
En réponse aux questions posées, l’ASN m’a indiqué que “durant l’incident, à partir du mercredi 10/04 fin de journée jusqu’au vendredi 12/04 vers 2h du matin, le périmètre de sécurité a été fixé pour assurer un débit de dose de 2,5 µSv/h à sa limite. Une fois que les protections biologiques ont été posées (à partir de jeudi 11/04 dans l’après-midi jusqu’au vendredi vers 2h), le périmètre de sécurité a pu être levé, le débit de dose à l’extérieur des locaux de l’entreprise étant inférieur à la limite de l’exposition du public (1 mSv/an).”
Bien que sous contrôle, l’incident n’est pas totalement clôturé puisque la source est pour l’instant encore sur place (sous les protections biologiques). Un protocole d’intervention a été proposé en fin de semaine dernière par le fournisseur de l’appareil (Cegelec Actemium) et validé par les services centraux de l’ASN, l’intervention est planifiée dans la semaine.
Or, il s’avère que l’entreprise concernée est située 14 Rue Edouard Branly à Colmar, donc à proximité de zones habitées.
L’ASN m’écrit que les mesures et une cartographie plus précise ont été réalisées par le SDIS 68. J’observe que la Préfecture n’a pas mis cette cartographie en ligne, aussi je vous remercie de me la communiquer.
En respect de la doctrine de transparence relative au nucléaire, nous vous prions de nous communiquer cette information, que nous mettrons à disposition du public sur notre site internet.
Avec mes remerciements et mes cordiales salutations (…).
NOTA 1 : Stop Fessenheim remercie l’ASN pour ses différentes réponses, rapides et transparentes, et espère qu’il en sera de même du côté de la Préfecture.
NOTA 2 : le 23 avril, l’assistante de Monsieur le Préfet nous a annoncé en ces termes la prise en considération de notre demande :
» Bonjour,
Vous avez adressé un courrier à Monsieur le Préfet du Haut-Rhin, qui a été réceptionné ce jour par nos services et qui sera traité dans les meilleurs délais. Bien cordialement. (…) »
7) 23.04.2024 la CRIIRAD apporte des explications très pédagogiques sur son site :
Ce laboratoire indépendant décrypte sur son site l’incident de Colmar. Grand merci !
8) Cartographie ? :
en attente de la réponse de la préfecture…
Dans le nucléaire, la transparence est voulue par la Loi, mais il faut la chercher car elle n’est délivrée qu’au compte-gouttes !
Ohé ! Monsieur le préfet, nous attendons encore la cartographie demandée par mail du 22 avril. Une semaine après notre demande… toujours rien ?
9) Alertée par nos soins, la presse pointe « une vérité à contretemps »
10) 02.05.2024 – Stop Fessenheim relance la Préfecture pour que la cartographie radiologique soit enfin publiée
Notre mail du 2 mai 2024 :
Monsieur le Préfet,
Le 10 avril en fin d’après-midi, suite à un incident avec une source radioactive d’iridium 192 utilisée sur le site ADF à Colmar par l’APAVE pour des opérations de grammagraphie sur soudures, un périmètre de sécurité avait dû être mis en place.
Face à l’absence d’informations suffisantes, nous avions dans un premier temps contacté l’ASN et obtenu que s’ensuive la publication d’un communiqué sur le site de l’ASN (le 12.04.2024 à 16h04).
Toutefois, l’ASN ne disposait pas (ou pas encore) de la cartographie des relevés radiologiques réalisés par le SDIS 68 dans le contexte des émissions radiologiques survenues à Colmar. Elle nous a donc dirigés vers vos services pour la solliciter.
Le 23 avril, vous avez bien voulu accuser réception de notre mail du 22 avril 2024 par lequel nous vous demandions de nous transmettre (ou de publier) cette cartographie.
Et depuis lors, malgré vos assurances, aucune suite ne nous a été communiquée.
Ceci est d’autant plus paradoxal que votre communiqué du 12.04.2024 était intitulé “Fin des opérations liées aux émissions radiologiques dans une entreprise à Colmar“ , alors qu’en réalité la source radioactive n’a pu être ré-introduite dans le grammagraphe que mercredi 24 avril et qu’entretemps le périmètre de sécurité avait été levé pour les populations demeurant à proximité.
Il s’agit de rayonnement gamma, ce n’est pas anodin !
Conformément aux règles de transparence régissant la sûreté nucléaire, nous vous réitérons notre demande : publication des cartographies radiologiques opérées à la suite de l’incident.
Nous informerons le public de la bonne suite que vous nous apporterez, par voie de presse et/ou de notre site internet.
Veuillez croire, Monsieur le Préfet, en nos sincères salutations.
11) 03.05.2024 : L’ASN publie un Complément à la note d’information du 12 avril 2024 et adresse à l’APAVE une « lettre de suite d’inspection » qui met en cause les conditions de radioprotection insuffisantes et qui dénonce le choix de la source radioactive, trop puissante et non adaptée à l’environnement dense du site !
Lire ici le nouveau communiqué de l’ASN en date du 03 mai 2024 :
Et lire ci-dessous la lettre de suite d’inspection adressée par l’ASN à l’APAVE.
Il est clair que l’APAVE a utilisé une source radioactive trop puissante au regard des besoins et de l’environnement dense du site.
03.05.2024 – A ce stade, l’ASN elle-même ne dispose pas de tous les relevés… ce qui peut expliquer l’impossibilité pour la préfecture de nous les produire, mais ce qui n’explique toujours pas pourquoi la préfecture avait annoncé dès le 12 avril la « fin des opérations » alors que la situation n’était pas réglée !
Nous espérons qu’aucun riverain n’aura été atteint par cette irradiation gamma. POUR LA SUITE DE CETTE AFFAIRE, allez régulièrement sur le site de l’ASN qui suit la situation… du mieux qu’elle le peut… André Hatz, pour Stop Fessenheim
…en tout cas, les difficultés rencontrées à obtenir une information claire en temps réel dans cette simple affaire de « radiographie » d’une soudure nous laissent augurer de l’omerta qui va accompagner le projet de « Technocentre » à Fessenheim.
12) Le mot de la fin… (encore) provisoirement…
En attendant que les informations attendues de la Préfecture nous permettent de mettre un point final à cette rubrique, nous laisserons le mot de la fin (provisoire) à l’une de nos plus fidèles militantes, qui nous écrivait il y a quelques jours avec un brin de dérision :
Ça a l’air passablement confus… Pas grave, pas dangereux, pas de dissémination mais on boucle et on évacue. Le niveau de radioactivité n’est pas revenu à la normale, mais pas de panique.Il faut faire venir un dispositif de l’autre bout de la France… Un bel exemple de la « sécurité » nucléaire, de l’impréparation, de l’improvisation…